Order for cooperation to national authorities

Notion(s) Filing Case
Decision on Exhibit P105 - 12.09.2006 NAHIMANA et al. (Media case)
(ICTR-99-52-A)

The Appeals Chamber clarified that it would only proceed with a request for an order for the purposes of an investigation if a party has shown a legitimate forensic purpose for it. It is a discretionary decision of the Chamber. While, in some cases, it may be that the Prosecution will use its own resources and extended powers to facilitate the obtainment of the information sought by the Defence, the obligation of the Defence to report to the Chamber its inability to obtain the cooperation of a State’s authorities is intended as a first step in exercising due diligence. The applicant is thus expected to show that she/he was unable to obtain such cooperation despite her/his own independent attempts to do so. A mere assertion that such an attempt would face obstruction from the national authorities is not sufficient to justify an order for cooperation.

13. […] Il fonde en réalité sa Requête sur les articles 54 et 107 du Règlement qui donnent à la Chambre d’appel le pouvoir de délivrer des ordonnances « nécessaires aux fins de l’enquête, de la préparation ou de la conduite du procès ». A cet égard, il convient de rappeler que la Chambre d’appel ne saurait accéder à une requête en délivrance d’une telle ordonnance que si la partie requérante a démontré un motif judiciaire légitime à cet effet[1]. La Chambre d’appel jouit en l’occurrence d’un pouvoir discrétionnaire pour déterminer si le requérant « a bien rapporté les preuves requises, ce pouvoir étant essentiel pour veiller à ce que la mesure coercitive […] ne soit pas appliquée de façon inconsidérée »[2]

14. Dans certains cas, une fois que les difficultés rencontrées par la Défense ont été portées à l’attention de la Chambre compétente, il se peut que le Procureur, conformément à son devoir d’assister le Tribunal aux fins d’établir la vérité et de rendre justice aux accusés[3], utilise ses propres ressources et pouvoirs afin de faciliter l’obtention de l’information nécessaire[4]. Cependant, l’obligation faite à la Défense d’informer la Chambre qu’elle ne peut obtenir la coopération escomptée des autorités étatiques constitue la première étape dans l’exercice de la diligence voulue[5]. La Chambre d’appel constate que l’Appelant n’a pas fait montre d’une telle diligence en l’espèce au stade actuel du procès.

15. Il appartient dès lors à l’Appelant d’entreprendre des démarches indépendantes pour se procurer des éléments de preuve à décharge qui ne sont pas en possession du Procureur, et de démontrer qu’en dépit de l’exercice de la diligence requise, il n’a pas réussi à obtenir l’enregistrement en question[6]. Or, dans sa Requête, l’Appelant se contente de dire que ses investigations « se seraient heurtées à l’obstruction des autorités rwandaises »[7] et ne donne aucun élément d’information sur les actions concrètes qu’il aurait engagées en ce sens depuis le début de son procès en appel. Il n’apporte pas non plus de preuve d’un manque de coopération de la part des autorités rwandaises en ce qui concerne l’accès aux archives dans lesquelles serait contenu l’enregistrement recherché. En conséquence, la demande de l’Appelant tendant à ce que la Chambre d’appel ordonne aux autorités rwandaises de transmettre au Greffe du Tribunal l’intégralité de l’interview doit être rejetée.

[1] Le Procureur c/ Joseph Nzirorera et consorts, affaire n°ICTR-98-44-I, Décision relative à la Requête de la Défense aux fins de la Délivrance d’une Ordonnance enjoignant aux témoins à charge de produire, lors de leur comparution, leurs agendas ou autres écrits datant de 1992 à 1994 et leurs déclarations faites devant des autorités judiciaires rwandaises, 24 novembre 2003, par. 6 ; Le Procureur c/ Radislav Krstić, affaire n°IT-98-33-A, Arrêt relatif à la demande d’injonctions, 1er juillet 2003 (ci-après « Arrêt Krstić »), par. 10.

[2] Le Procureur c/ Sefer Halilović, affaire n°IT-01-48-AR73, Décision relative à la délivrance d’injonctions, 21 juin 2004, par. 6 ; Le Procureur c/ Brđanin et Talić, affaire n°IT-99-36-AR73.9, Décision relative à l’appel interlocutoire, 11 décembre 2002, par. 31.

[3] Règlement interne du Procureur n°2 (1999), Règles de déontologie pour les représentants de l’Accusation, 14 septembre 1999, par. 2. h).

[4] Arrêt Krstić, par. 13.

[5] Ibid., par. 14, [Arrêt Krstić].

[6] Ibid., par. 5, 9-10, [Arrêt Krstić] ; voir, par analogie, Le Procureur c/ Augustin Bizimungu et consorts, affaire n°ICTR-00-56-T, Décision sur la requête de Nzuwonemeye intitulée Request of Cooperation from the Kingdom of Belgium pursuant to Article 28 of the Statute, 7 Juin 2006, par. 6; Le Procureur c/ Théoneste Bagosora et consorts, affaire n°ICTR-98-41-T, Décision relative à la Demande de Coopération et d’Assistance Adressée au Royaume des Pays-Bas, 7 février 2005, par. 5; Le Procureur c/ André Rwamakuba et consorts, affaire n°ICTR-98-44-T, Décision relative aux requêtes de la Défense : aux fins d’être autorisée à faire appel des décisions rejetant ses requêtes pour contre-interroger les témoins sur des déclarations antérieures contradictoires et aux fins d’une ordonnance enjoignant aux autorités rwandaises de donner accès à certains dossiers judiciaires et de mettre à la disposition de la Défense une copie authentifiée des pièces pertinentes dans ces dossiers, 4 février 2004, par. 18 ; The Prosecutor v. Aloys Simba, Case No. ICTR-01-76-T, Decision on the Defence Request for the Cooperation of Rwandan Government pursuant to Article 28, 28 October 2004, par. 3-5 ; The Prosecutor v. Aloys Simba, Case No. ICTR-01-76-T, Decision on Defence Motion to Obtain Judicial Records pursuant to Rule 68, 4 October 2004, par. 11.

La Chambre d’appel note par ailleurs que l’article 54bisA) du Règlement du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (ci-après « TPIY ») spécifie les éléments qui doivent être identifiés par la partie sollicitant la délivrance à un Etat d’une ordonnance aux fins de productions de documents ou d’informations, ces conditions étant obligatoires et cumulatives. Ainsi, le requérant « i) identifie autant que possible les documents ou les informations visés par la requête, ii) indique dans quelle mesure ils sont pertinents pour toute question soulevée devant le juge ou la Chambre de première instance et nécessaires au règlement équitable de celle-ci, et iii) expose les démarches qui ont été entreprises par le requérant en vue d’obtenir 1’assistance de 1’Etat ». Voir, Le Procureur c/ Slobodan Milošević, affaire n°IT-02-54-T, Décision [confidentielle] relative aux demandes présentées par l’Accusation et la Serbie-et-Monténegro en application de l’article 54 bis du Règlement, 9 mars 2006, par. 13 ; Le Procureur c/ Milan Milutinović et consorts, affaire n°IT-99-37-PT, Décision relative à la Requête de Dragoljub Ojdanić aux fins de délivrance d’ordonnances contraignantes en application de l’article 54 bis du Règlement, 23 mars 2005, pp. 3-8 ; Le Procureur c/ Dario Kordić et Mario Čerkez, affaire n°IT-95-14/2-A, Décision [confidentielle] relative à la requête aux fins d’adresser une ordonnance contraignante à la Bosnie-Herzégovine et à la Fédération de Bosnie-Herzégovine, et d’accéder aux pièces actuellement en la possession de l’Accusation, 15 novembre 2001, p. 6 ; voir aussi Le Procureur c/ Tihomir Blaškić, affaire n°IT-95-14-AR108bis, Arrêt relatif à la requête de la République de Croatie aux fins d’examen de la Décision de la Chambre de première instance II rendue le 18 juillet 1997, 29 octobre 1997, par. 32.

La Chambre d’appel note que les mêmes critères ont été appliqués par les Chambres de première instance du Tribunal de céans dans le contexte des requêtes au titre de l’article 28 du Statut. Voir, The Prosecutor v. Edouard Karemera et al., Case No. ICTR-98-44-T, Decision on Motions for Order for Production of Documents by the Government of Rwanda and for Consequential Orders, 13 February 2006, par. 7-8; The Prosecutor v. Edouard Karemera et al., Case No. ICTR-98-44-PT, Decision on Joseph Nzirorera’s Motion for a Request for Governmental Cooperation, 19 April 2005, par. 6-9.

[7] Requête, par. 16 (non souligné dans l’original), [Requête aux fins de communication d’éléments de preuve disculpatoires et d’investigations sur l’origine et le contenu de la pièce à conviction P 105, déposée confidentiellement le 10 avril 2006].

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